Me voilà lui donnant la main, moi qui suis heureux de sortir par cette belle journée.
Ce petit être, de sa hauteur de trois ans, s’émerveille de tout. Il est là, dans le monde, et me donne la main…
Je rends un service à une amie, elle me laisse son p’tit gars pendant deux heures, afin d’aller à cette réunion de travail si importante. Alors je m’empresse de proposer au bambin d’aller se dégourdir les jambes à la place de jeux, située à quelques mètres de la maison.
Le petit me donne la main et me raconte sa vie, la Vie, ce qu’il voit et perçoit dans cet environnement. Il me parle du camion qui roule à vive allure dans la rue, de cette fleur qui sent bon et il écoute avec attention lorsque je lui annonce que l’on va traverser la route.
Arrivés à la fameuse place, il court et s’empresse d’essayer tous les toboggans et autres ponts de cordes qui sont à sa portée et me voilà sur un banc, à le regarder et à capter ce qui se passe en lui. La joie, l’envie de s’amuser, de vivre une aventure : Il est dans l’instant présent et cela me permet de me plonger dans le mien.
Indéniablement, mon esprit s’évade et se perd dans quelques souvenirs, ceux de mes enfants qui ont aujourd’hui 10 ans de plus que lui et qui sont en pleine adolescence et construction de leurs égo… Je réfléchis un peu et je vois ce petit bonhomme, qui sort du sable du grand bac dans lequel il était, s’amusant à créer un tas en dehors du carré, si bien démarqué par des bordures en béton et par ma vision d’adulte.
Avec patience et minutie, le voilà en train de faire une belle motte de sable en dehors de cette zone si bien délimitée… ! Je m’approche de lui et lui explique que c’est ok, mais qu’avant de partir, il faudra le remettre à sa place. Ce qu’il exécute immédiatement, parce qu’il trouve tout aussi rigolo de mettre du sable en dehors du carré que de le remettre dedans. Belle (première) leçon que voilà :apprécier les choses et y trouver un intérêt, peu importe dans quel sens elles vont.
Je retourne à mon banc et à mes pensées… Pourquoi cette attitude bienveillante, compréhensive et à l’écoute est à DES KILOMETRES de ce que je peux vivre avec mes ados ? Je ne comprends pas et j’essaie de prendre du recul. En quoi la personne que je suis peut-elle être si différente de celle que je suis avec d’autres enfants, en l’occurrence les miens ? Ma main s’élève pour aller fouiner dans mes cheveux, gratte, gratte… je me penche sur moi et analyse…, encore… Pourquoi mon rôle serait si différent… pourquoi… le rôle…
Voilà que mon esprit s’illumine et comprend enfin.
Je le comprends de manière évidente, car cela fait lien avec mon mode relationnel ouvert et encore et toujours mon chemin de développement personnel.
Lorsque nous rencontrons quelqu’un, lorsque nous sommes avec lui quelques instants, que l’on garde un enfant ou lorsque l’on passe une nuit avec un partenaire pour la première fois, nous ne jouons aucun rôle, nous sommes nous, simplement. Nous sommes des êtres de lumière qui font leur vie et passent leur chemin.
Mais lorsque nous commençons à prendre de la place dans l’agenda, lorsque nous planifions des soirées ou quand notre chéri(e) nous présente à sa famille, petit à petit nous endossons des rôles, nous devenons des pères et des mères, des époux ou des partenaires, des amis ou des collègues.
Alors ces rôles prennent de la place et nous finissons par nous identifier à eux : « Je suis ton père et c’est comme cela » disais-je à mon fils de 14 ans (ben oui, il faut bien que certains de mes travers soient tenaces, sinon, je m’ennuierais je crois…).
Il en est de même dans chaque relation et le polyamour ne fait pas exception à la règle. Plus encore, il multiplie les rôles que nous endossons au fur et à mesure de nos expériences et nos nouvelles relations.
J’ai alors compris avec ce petit être que si nous voulons augmenter notre qualité relationnelle, nous devons nous sortir de ces rôles et voir l’autre tel qu’il est : une personne, un soleil, une entité parfaite et qui a tout un monde à découvrir. Je ne suis pas son père, son partenaire ou son conjoint, je suis « moi », elle est « elle », ils sont « eux ». C’est ainsi que nous pourrons alors déployer une relation équilibrée et alignée. Sortir de ces rôles qui, insidieusement, nous ont mis dans des cases, c’est avoir le recul nécessaire pour gagner en qualité et en maturité relationnelle.
Évidemment que pour nombre de personnes, il faudra toujours des termes pour désigner la filiation ou les liens qui nous unissent, mais ce ne sont que des termes. Malheureusement, nous leur attribuons un rôle dans lequel on se perd parfois pour répondre à une certaine norme.
Sortons de cela, regardons les êtres humains que nous sommes en dehors de nos fiertés, de nos rôles et de notre égo. Ainsi, nous vivrons des relations de manière plus équilibrée, d’être humain à être humain. Dans la bienveillance, le respect et l’autonomie de chacun.
Soyons ces enfants que nous avons oublié d’être, ouvrons nos yeux et notre cœur sur ce qu’ils nous appellent à faire : être dans la joyeuse danse de la Vie !
Crédit Photo: Yann Billieux
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